Ce très beau texte nous est proposé par Mariette. Qu'elle soit ici remerciée.
Oyez, Cadiens, Cadiennes, aujourd’hui il s’agit de faire attention où vos arpions se poseront. Vous avez reconnu, dans la pelouse calcaire où nous nous trouvons, le plantain et la globulaire, le lin à petites feuilles (Linum tenuifolium) et observé les nombreuses touffes de choin noirâtre. Mais oui, ces touffes de courtes tiges raides, terminées par des épis réunis en tête ovale, dense, brun noirâtre, que vous auriez volontiers identifiées à tort comme des joncs ou des graminées – ces fleurs mal aimées, impossible à reconnaître – .
Mais l’intérêt de la balade n’est pas là. Si nous sommes aujourd’hui dans le parc de la Valmasque, juste au-dessus d’Antibes, c’est pour les délicates et éphémères orchidées sauvages qui fleurissent au printemps. Beaucoup d’entre elles savent bien passer inaperçues pour notre œil d’humain. Regardez, là, puis là, encore ici. Attention, on ne recule pas, on n’écrase pas, on avance avec délicatesse. Et, avec étonnement, on découvre ces curieuses fleurs.
Voici la première espèce rencontrée, ophrys bécasse (Ophrys scolopax). Trois sépales rose clair, trois pétales dont 2 petits et un plus grand appelé labelle qui ressemble à s’y méprendre au corps d’un insecte. En se contorsionnant pour ne pas abimer la fleur, on essaye aussi de repérer le gynostème, un organe bien particulier à l’orchidée, qui porte à la fois le stigmate (partie supérieure collante qui surmonte le pistil) mais aussi 2 pollinies (des « étamines »).
A l’ophrys bécasse est inféodé un insecte de la famille des Tantrènes.
En effet, la fleur de l’ophys bécasse produit une phéromone (substance chimique) semblable à celle secrétée par la femelle de l’insecte. Ce dernier, d’abord attiré, se laisse de nouveau berner par l’aspect du labelle de la fleur qu’il confond avec sa femelle et s’y pose. Là, alors qu’il croit copuler avec sa femelle, les 2 pollinies cachées dans le gynostème se collent sur sa tête… L’insecte mâle repartira ensuite visiter une autre ophrys bécasse tout en emportant le précieux pollen, ce qui assurera ainsi la fécondation croisée de l’ophrys, étape de sa reproduction sexuée.
Ce parfait mimétisme (ressemblance) entre l’ophrys bécasse et cet insecte résulte d’une coévolution de ces 2 espèces au cours du temps.
Nous avons également observé d’autres orchidées:
- Sérapias lingua, une orchidée rose moins discrète que l’ophrys bécasse. Chez elle, le labelle de la fleur est en deux parties, l’une horizontale, l’autre verticale, les autres pièces florales formant comme une espèce de tube.
-l’ophrys de Provence (Ophrys provIncialis), dont le labelle bombé porte un H gris et une tache basale rouge, des gibbosités basales relativement réduites (= fausses pattes). Les autres pièces florales sont verdâtres.
- la céphalanthère, orchidée blanche
- et surtout l’ophrys bombyx (Ophryx bombyliflora)… mais chut, vous avez promis de ne pas révéler où elle se cache ! son pollinisateur n’est pas présent sur cette station, si ses plants étaient piétinés, elle pourrait disparaître de cet endroit. Comment se maintient-elle ici ? Par reproduction asexuée, ce que de nombreux végétaux sont capables de faire.
Parmi les plantes rencontrées, autres que les orchidées, l’Aristoloche a connu un vif succès. Malheureusement, nous n’avons pas vu le papillon qui lui est inféodé, un beau papillon avec des bandes et carrés noirs et blanc jaunâtre avec des points rouges à la base. Ce papillon, appelé Diane, est protégé.
Le grémil pourpre aussi a attiré notre attention. Ses fleurs, petites, sont d’abord roses puis bleues en vieillissant. Son nom scientifique est Lithospermum qui veut dire des graines (spermun) de pierre (litho). On a eu la chance de le vérifier, sur une plante sèche de l’année dernière où étaient encore accrochées des petites graines blanches bien dures.
Sur le retour, enfin dame couleuvre (d’Esculape) nous attendait. Pourtant la belle a échappé à l’attention de Thierry qui, trop ennuyé de ne plus trouver sa loupe, cogitait sur la stratégie à adopter pour que le groupe continue son chemin et lui puisse refaire le trajet inverse.
Et comme dans toutes les belles histoires, la loupe a été retrouvée dans une poche et nous sommes rentrés, heureux de l’amitié partagée et comblés par toutes nos belles observations.
Observations 24 avril 2016
Les Orchidées
D'autres végétaux
Divers
Les Orchidées
- L'Ophrys bécasse (Ophrys scolopax) Orchidée dont le gynostème peut faire penser à la tête et au bec de la bécasse,
- Le sérapias langue (Serapias lingua)
- L’Ophrys de Provence (Ophrys provincialis)
- La Céphalanthère à longues feuilles (Cephalanthera longifolia) aux élégantes fleurs blanches
- L'Ophrys fausse araignée (Ophrys exaltata)
- L'orchis papillon, (Anacamptis papilionacea) au labelle crenellé
- L’Ophrys bombyx (Ophrys bombyliflora)
- L'Ophrys bécasse (Ophrys scolopax)
D'autres végétaux
- Le Lin à feuilles menues, Lin à petites feuilles (Linum tenuifolium) linacé
- L'Euphorbe faux amandier ( Euphorbia amygdaloides)
- Le Choin noirâtre (Schoenus nigricans) Cyperaceae
- Le Polygale commun (Polygala vulgaris)
- L'aristoloche : sa fleur a la forme d'un tube courbé. L'insecte polénisateur se fait emprisonné par la fleur et doit trouer le pétale pour sortir.
- Le Glaieul sauvage (Gladiolus italicum)
- Le Dompte-venin officinal (Vincetoxicum hirundinaria) Asclépiadacée.
- La badasse (Dorycnium pentaphyllum), fabacée
- Le Muscari à toupet (Muscari comosum) liliacée
- L'Épervière des murs (Hieracium murorum) astéracée à fleur jaune
- Le Grémil pourpre bleu (Buglossoides purpurocaerulea) Boraginacée à fleur d'un beau bleu, et à graine très dure,
- La bugle rampante (Ajuga reptans) Lamiacée rhizomateuse persistante qui produit des stolons.
- Le daphné lauréole, (Daphne laureola ) thyméléacée
- La Consoude tubéreuse (Symphytum tuberosum ) Boraginace
- La sauge fausse verveine (Salvia verbenaca) Lamiacée
Divers
- La Couleuvre d'Esculape, (Zamenis longissimus)